mardi 19 février 2008

Bonsoir,


Dimanche soir, Widodo m'apprend qu'on va voir du Wayang. Je me réjouis, bien sûr ! Il me dit ensuite que cela va durer 7h. Je me dis que ça va aller, que j'ai déjà vu parfois plus long en France (...).


On s'apprêtait à partir quand on reçoit la visite de deux hommes dont l'un que j'avais déjà rencontré au mariage et qui m'avait paru un peu collant, fatiguant. Ils sont restés 1h30. Je me suis ennuyée comme c'est pas permis pendant qu'ils étaient là, et du coup je me disais « oulah, si tu n'arrives pas à supporter 1h30, les 7h de wayang vont être difficiles ! ».

Sur cette crainte, on prend la voiture et on s'en va pour la nuit.


Dès les premières minutes de la représentation, j'ai été certaine que je ne m'ennuierai pas du tout. Et effectivement, ça n'a pas été le cas. L'anecdote de la visite ennuyante, c'est pour vous dire que parfois, on s'ennuie plus en 1h30 de temps qu'en 7h. (au passage : « un temps paraît long lorsqu'il n'est pas juste »).


Par où commencer pour vous parler de cette nuit de théâtre d'ombres...... Il y a tellement de choses à dire. Je crois que ce soir là, j'ai senti que je ne m'étais pas trompée, que c'est vraiment du théâtre que je veux faire dans ma vie. C'est tout bête mais j'ai eu la preuve que le théâtre peut réunir les hommes et les rendre meilleurs entre eux.


Une citation au passage, qui m'accompagne depuis quelques temps, que j'ai souvent en tête :


« Pour que le théâtre vive, il faut qu'il apporte à l'Homme des raisons de croire, d'espérer, de s'épanouir ».

Jean Vilar


Pour vous donner une idée de l'ambiance des représentations ici : je me croyais à une sorte de fête de famille où le cousin Albert a préparé une chanson pour tout le monde, ou bien la petite cousine Chantal qui a écrit une scène de théâtre... et toute la famille rit, partage ce moment. Chacun peut intervenir comme il veut, les acteurs (ou le marionnettiste) ne sont pas réellement plus importants que les spectateurs. C'est un vrai moment de partage.


Toute la nuit on nous sert à manger (soupes, gâteaux, thé, riz, viandes, cacahuètes et... redbull en fin de représentation pour tenir le coup !) on peut s'asseoir par terre, se balader au milieu des musiciens, dormir dans un coin, fumer, discuter avec son voisin (oserais-je dire son prochain ?)...


A un moment, l'un des comédiens qui était pour animer, a demandé à Widodo et sa femme de venir. Ils ont joué ensemble, on parlé de plein de choses, sa femme a chanté (elle est chanteuse traditionnelle de métier). Je pense qu'ils sont réellement des gens importants dans la Région, tout le monde les connaît. Et puis évidemment..., ça devait arriver, on m'a dit de venir aussi. Ils voulaient que je chante aussi. J'ai décliné l'invitation. Mais j'y suis quand même allé pour discuter, raconter pourquoi j'étais là etc. Du coup après, toute l'assemblée savait qui j'étais et j'avais droit à des sourires et des « hello miss cécile! » de la part de tout le monde !





Widodo et sa femme, devant l'écran (où il n'y a personne en fait ! tout le monde regarde derrière)




l'intérieur et l'extérieur de la salle avec plein de monde qui regarde de l'extérieur du dehors


vers 3h du matin..., et le détail des nombreuses marionnettes plantées en file indienne sur le côté gauche de l'écran (pareil à droite)



Je ne crois pas pouvoir réellement bien décrire tout cela. Pas moyen de trouver les bons mots, il faut le vivre pour savoir.


En tous cas, ça m'a permit de (presque) balayer ce trentième kilomètre ! Ça m'a réconfortée, j'étais bien, en famille, dans une ambiance profondément altruiste.


En dehors de ça, je travaille. Encore et toujours. D'arrache pied. Je suis rentrée du Wayang à 5h du matin (à l'arrière d'une moto, vent de liberté en pleine nuit), j'ai dormi 3h et hop ! Au boulot !


Je travaille la manipulation, je m'exerce. Faire et refaire encore. Pour le moment, Widodo me fait travailler le combat entre Hanuman et Angkot, deux singes. C'est ce qui est le plus difficile donc lorsque je maîtriserai cela, j'aurai fait le plus gros.


Et puis je lis. Me suis plongée dans le Mahābhārata.


Et puis aussi aujourd'hui on a commencé le chant. Le dalang chante parfois pour introduire une scène. Il existe 3 types de chant :coléreux, calme, triste. Celui que je travaille fait partie de la deuxième catégorie.



Dans l'ensemble, je crois que Widodo est plutôt content de moi. Un rapport simple est en train de s'installer entre nous, où l'on peut se dire les choses sans prendre des pincettes.


Dans le Mahābhārata, j'ai lu une phrase qui me donne la « force de continuer » :


« L'aveugle ne sait ni comme il va, ni où il marche.

L'homme sans volonté est pire qu'aveugle. »

Varuda, Dieu de la Vertu



Voilà en gros : je ne sais pas vraiment où je vais mais j'en prends le chemin en tous cas.




1 commentaire:

Anonyme a dit…

bin voilà, le moral, les aventures, les 'tites phrases qui nous poussent de temps en temps, des relations sincères, des décisions, du boulot... c'est super, merci miss Cécile.
alexis